Ecoles publiques : Que la chasse aux enseignants commence !

par NORDSUD
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Le manque d’enseignants dans nos établissements fait partie des principaux points des états généraux de l’Education nationale. Et la ministre Mariatou Koné a bien l’intention de régler le problème à sa manière.

Selon les récentes statistiques, la Côte d’Ivoire compte environ 73.000 enseignants au secondaire pour un peu plus de 2,5 millions d’élèves. Ce qui fait un ratio d’un enseignant pour 35 élèves. Vu sous cet angle, tout va bien. Sauf que depuis plusieurs années, des milliers d’élèves sont sans enseignants dans leurs localités. Malgré le système de bénévolat et de recrutements exceptionnels, les autorités ne parviennent pas à combler le vide. En témoigne Kokounseu Madé Benson, président du Collectif des inspecteurs pédagogiques diplômés de l’ENS, basé à l’antenne de la pédagogie et de la formation continue de Man. « Nous voyons des élèves qui font deux à trois ans sans avoir rencontré un seul professeur de mathématique ou de science physique », souligne le pédagogue. Kadio Claude, Président de l’Organisation des parents d’élèves et d’étudiants de Côte d’Ivoire, en a fait les frais cette année. « Ma fille n’avait pas d’enseignant d’histoire et géographie. Ça l’a pénalisée pendant le baccalauréat », regrette-t-il.

Nouvelle répartition des profs

Lors des états généraux de l’Education nationale, le problème a été posé. Il figure dans les résolutions finales. Mais les acteurs parlent de déficit d’enseignants, là où les autorités pointent du doigt une mauvaise répartition des profs. Les zones Nord, Ouest, voire, Centre, sont les plus touchées, tandis qu’au Sud l’on assiste à une concentration d’enseignants. Il y a environ deux mois à Yamoussoukro, la Direction des ressources humaines du ministère de l’Education nationale, planchait sur ce phénomène. Selon plusieurs sources, il s’agit, dès la prochaine rentrée scolaire, de procéder à une vague d’affections pour combler le gap. Un enseignant refuse d’aller dans une zone ? Il n’a qu’à se trouver un autre métier. Quelqu’un paye des pots de vins pour ne pas être affecté dans une localité ? On le sanctionne. Théoriquement cela semblefaisable pour la ministre Mariatou Koné. Mais, le déficit se résume-t-il réellement à un déséquilibre ? Oui, à 80%, selon un proche collaborateur de la ministre. « Ce qu’on constate, c’est que les gens ne viennent pas dans l’enseignement pour faire carrière. La passion n’y est pas et cela gangrène le système. Mais on n’y peut rien. Il faut être rigoureux dans un secteur comme l’Education nationale. La ministre jette un regard strict sur les indisponibilités tout azimut que l’on constate, ainsi que les affections dans d’autres départements. Une fois qu’on aura établi l’équilibre d’enseignants, le déficit sera résorbé en grande partie », note notre interlocuteur.

Pas de profs de mathématiques

Le faible niveau à l’école est imputé aux enseignants.

Au sein des enseignants, ils ont été nombreux à signaler le déficit, mais pas le déséquilibre. Et à entendre Bertoli Kouamé, porte-parole de la Coalition des syndicats du secteur éducation/formation de Côte d’Ivoire (Cosefci), la réaffectation ne saurait pallier ce manque. « Il faut recruter plus d’enseignants. Nous avons salué le dernier recrutement exceptionnel, mais cela doit continuer. Il est vrai que certains enseignants refusent d’être affectés dans des zones, mais ce n’est pas uniquement pour cela que les classes n’ont pas de profs. Chaque année, beaucoup vont à la retraite, d’autres nous quittent à jamais et un grand nombre part de l’enseignement. Vous ne pouvez pas les en empêcher», indique M. Kouamé. De son côté,Ekoun Kouassi, le secrétaire général des enseignants du second degré de Côte d’Ivoire, informe que dans certains établissements, ils sont obligés de transformer les professeurs de sciences physiques en professeurs de mathématiques. Il y a certes un déséquilibre, dit-il, mais également un déficit.

Concours d’entrée à l’ENS

En fait, le manque d’enseignants en Côte d’Ivoire est estimé à environ 5 000, rien que pour les collèges et lycées. Et chaque année, il y a plus d’élèves que d’enseignants. Pour comprendre ce gap, nous nous sommes adressés à l’Ecole normale supérieure (ENS) d’Abidjan. Dans cette prestigieuse école, le quota d’enseignants formés par an dépend des postes budgétaires disponibles. Ces postes oscillent entre 700 et 1000. « Le concours d’entrée à l’ENS sert à recruter un certain nombre de personnes que l’Etat est en mesure de payer. Ce sont ces personnes que l’ENS forme», explique Prof. N’Guessan Kouamé, porte-parole des enseignants au sein de la structure. Et l’enseignant d’ajouter : « Chaque année, on nous demande de former environ 100 enseignants de mathématique à l’ENS. Mais nous n’arrivons pas à atteindre ce chiffre, parce que la discipline est difficile ». Depuis l’époque du Prof. Valy Sidibé, ancien directeur général de l’établissement, on n’a pas cessé de réclamer plus de postes budgétaires, en vain. La vérité, c’est que les autorités cherchent plutôt à réduire la masse salariale.C’est donc un dilemme: comment recruter sans payer ?

Georges Dagou

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