Salif Coulibaly, DG de la Fenapaci: «Le Ghana attire nos producteurs d’anacarde»

par NORDSUD
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Le directeur général de la Fédération nationale des producteurs d’anacarde de Côte d’Ivoire (Fenapaci) explique dans cette interview l’importance de la transformation locale et les difficultés de la filière.

Le gouvernement vient de fixer le prix du kilogramme du coton et celui du café. Au niveau de l’anacarde, avez-vous des souhaits quant aux prochains prix du kilogramme de la noix de cajou ?

Bien sûr et mon seul souhait est que le prix fixé soit respecté pour le bonheur des producteurs d’anacarde. Le prix du kilogramme de la noix brute de cajou a été fixé à 325 francs CFA la campagne écoulée. Nous espérons qu’il sera au-delà.

Y a-t-il des risques pour que le prix baisse, cette année ?

Vous savez, à l’instar des autres cultures de rente, le prix du kg de cajou varie en fonction du marché international. Mais après que le prix soit fixé, nous, les producteurs, pouvons spéculer en fonction de la loi du marché.

Aujourd’hui, quel est le poids de la noix de cajou dans l’économie du nord ?

Je peux fièrement dire que l’anacarde a boosté l’économie du nord, car en termes de gains, l’anacarde surpasse de loin le coton. Et à voir les réalisations dans les villages situés dans la zone septentrionale de notre pays, on peut dire que le cajou a apporté beaucoup à nos parents.

Les producteurs, selon vous, bénéficient-ils des retombées de ce produit ?

Bien sûr que les producteurs bénéficient des retombées de leurs produits. Mais ils bénéficieraient mieux si les prix étaient respectés. Malheureusement, les gens ne respectent pas toujours les prix fixés.

Que faudrait-il pour qu’ils jouissent pleinement de la culture de l’anacarde ?

Il faut que la filière soit bien organisée, que l’Organisation interprofessionnelle agricole (OIA) de la filière cajou soit mise en place afin que les acteurs de la chaîne de valeurs de notre filière puissent prendre leur destin en main.

Combien de producteurs compte le pays ?

Le pays compte environ 500 000 producteurs. La Côte d’Ivoire est le premier pays producteur de noix de cajou brutes avec 850 000 tonnes. Et si nos frontières n’étaient si poreuses, la production atteindrait les 1 000 000 tonnes.  Nous perdons environ 150 000 tonnes par an.

Pourquoi les producteurs continuent-ils à vendre leurs produits dans les pays voisins ?

À cause du prix. Dans la région de Bondoukou et Bouna par exemple, la qualité de l’anacarde est très bonne. Pendant que le kg est payé en Côte d’Ivoire à 325 FCFA, les Ghanéens proposent 350 FCFA. Alors, les producteurs se cachent pour aller vendre leurs produits là-bas. Le Gontougo était classé 1er avant dans la production de noix de cajou. Aujourd’hui, cette région occupe la 10ème place, à cause des fuites des produits vers le Ghana.

Pourquoi le Ghana achète-t-il la noix de cajou plus cher que la Côte d’Ivoire ?

Parce que dans le Gontougo, la qualité est meilleure qu’au Ghana. Ils en ont besoin pour le mélanger à leur production.  Mais si le Ghana achète le kg plus cher avec les producteurs Ivoiriens, le pays pratique un prix plus bas avec ses propres producteurs.

Que font les autorités Ivoiriennes face à cette situation ?

Les autorités sont impuissantes. Il y a quelques camions qui sont interceptés, parfois, mais c’est tout. Parce que les producteurs sortent la nuit avec leurs produits et ils passent par des chemins dangereux. Nous comprenons qu’ils partent vendre leurs produits au Ghana, mais qu’ils payent d’abord les taxes.

Y a-t-il d’autres pays voisins qui achètent clandestinement la noix de cajou de la Côte d’Ivoire ?

Cela se passe dans la frontière avec le Burkina et avec la Guinée. Mais le problème principal vient du Ghana.

Outre ce problème, quelles sont les autres difficultés du secteur ?

Les problèmes sont multiples à savoir : l’épineuse question de l’organisation de la filière à travers l’identification des producteurs. Car ce volet est laissé aux acteurs qui n’ont pas les moyens financiers pour le faire. À côté de cela, il y a l’inexistence de l’OIA.  

Où en est-on avec la transformation ?

Le gouvernement, à travers le Conseil du coton et de l’anacarde (CCA) a fait beaucoup d’efforts dans ce sens, avec la création d’usines-écoles afin de former au métier de la transformation.  Le CCA a fait installer de petites unités de transformation dans certaines régions. Nous avons très tôt compris que l’Etat providence est terminé. A ce titre, nous avons tissé des contacts avec des partenaires extérieurs pour continuer la transformation locale.

Entretien réalisé par Raphaël Tanoh

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