La bataille pour le renouvellement des instances dirigeantes de la Mutuelle générale des fonctionnaires de Côte d’Ivoire (Mugefci) est lancée.
Ce mercredi, Gnagna Zadi Théodore, président de la Plateforme nationale des organisations professionnelles du secteur public a officiellement annoncé sa candidature pour briguer la présidence du conseil d’administration (PCA) de la mutuelle.
Avec comme nom de liste «Maturité-Unité-Renaissance (MUR)», Gnagna Zadi Théodore a soulevé un point capital dans la course au poste du président du conseil d’administration (PCA) de la Mugefci : la manne financière.
Le secrétaire général de la Confédération générale syndicale des travailleurs de Côte d’Ivoire (Cgst-CI) estime que la gestion devait être l’élément central. S’il est élu, par exemple, Gnagna Zadi promet de baisser les salaires des dirigeants de moitié. Le budget annuel de la Mugefci est de 38 milliards FCFA par an. La loi autorise les dirigeants à prendre jusqu’à 20% de ce budget pour le fonctionnement de la mutuelle. Soit autour de 8 milliards FCFA. Le reste étant dédié aux prestations. Et c’est la masse salariale qui engouffre l’essentiel. Ces milliards attirent forcément.
200 000 FCFA
En plus de cela, la Mugefci signe de nombreux contrats pour les prestations des fonctionnaires. Elle lance de nouveaux produits comme la «carte intelligente» vendue par les dirigeants actuels à 10 000 FCFA et censée permettre aux mutualistes de bénéficier de prestations de santé à l’hôpital et en pharmacie, d’accéder à des services bancaires. Pour près de 200 000 fonctionnaires, c’est énorme.
«En dehors des élections politiques, aujourd’hui, l’élection qui crée le plus d’inquiétude est celle de la Mugefci», a reconnu ce mercredi Gnagna Zadi Théodore, au Plateau, lors du lancement de sa campagne, à la maison de l’entreprise.
Ceux qui viennent à la tête de la structure, se préoccupent plus de traire la vache que de la nourrir. Tout comme la Caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps) le fait, la Mugefci peut procéder à des investissements qui lui rapporteraient de l’argent, afin qu’elle ne dépende plus totalement des cotisations des fonctionnaires. Hélas, avec l’arrimage, la mutuelle doit aujourd’hui financer la Couverture maladie universelle (CMU). Et c’est plus que jamais le moment de diversifier ses sources de revenus.
Crise
Depuis la crise de 2011 où l’Etat a été contraint de mettre la gestion de la Mugefci sous tutelle, les dirigeants de la mutuelle ont du mal à céder pacifiquement les rênes de cet alléchant outil.
Holland N’Da, en 2012, Mamadou Soro, en 2017. Mesmin Komoé, l’actuel PCA vient d’adouber Dr Kamara Mam Assetou pour le remplacer à la tête de la mutuelle, pendant les élections de septembre prochain. Pour les autres candidats, le «camarade Komoé» essaie de se «réincarner» dans la peau d’une autre personne afin de demeurer aux commandes, parce que les textes ne lui permettent plus de se représenter après 4 ans.
Dr Kamara Mam Assetou aura un avantage sur ses autres concurrents, parce qu’elle bénéficiera de l’électorat qui a placé Mesmin Komoé à la tête de la Mugefci, en 2017. Si, bien sûr, le même électorat n’est pas las de la gestion du PCA, jugé «chaotique», par Bli Blé David, porte-parole de l’Intersyndicale des enseignants du primaire public de Côte d’Ivoire (Iseppci). Bli Blé a annoncé sa candidature la semaine dernière avec comme nom de liste «Agir pour une Mugefci plus sociale».
Assainissement
Lui aussi parle d’assainissement. Il veut rendre la mutuelle aux mutualistes. Tous veulent rendre la mutuelle aux mutualistes. Gnogbo Paul, également, le secrétaire général du Mouvement des instituteurs pour la défense de leurs droits (Midd). Il s’est déclaré candidat avec la liste «Solidarité Santé». Son ancien partenaire, Mesmin Komoé, n’est plus qu’un obstacle pour lui, parce que M. Gnogbo se désolidarise désormais de la gestion de ce dernier.
On n’attend d’autres déclarations de candidatures. Mais, les grosses têtes pour cette élection se sont annoncées.
4 candidats déclarés pour gérer les milliards de la Mugefci… La seule manière d’éviter qu’il ait du grabuge, sera l’implication totale des autorités ivoiriennes dans l’organisation de ces élections. Depuis le ministère de la Santé, jusqu’à celui de l’Emploi et de la protection sociale, en passant par le ministère de la Fonction publique.
Par ailleurs, Jean-Yves Abonga, le président de l’Intersyndicale des fonctionnaires de Côte d’Ivorie (Ifci), note que, selon l’article 11 du code électoral, en son alinéa 4, chaque bureau de vote comprend : un président, un représentant de chaque liste et deux assesseurs. Or, en 2017, cela n’a pas été respecté.
«Si nous partons de l’hypothèse que 30% du nombre total des fonctionnaires d’Abidjan (154 174) participeront au vote, soit 46252, il nous faudrait en moyenne 193 bureaux de vote à Abidjan. Or le nombre total de bureaux de vote était de 38 à Abidjan en 2017. Cette analyse nous amène à nous pencher également sur la détermination du nombre et des lieux des bureaux de vote.
Pour promouvoir la transparence des futures élections, ces questions doivent trouver des réponses, de manière consensuelle, à l’initiative du Conseil d’Administration de la Mugefci ou à défaut de la tutelle administrative», interpelle-t-il.
Comme quasiment toutes les élections en Côte d’Ivoire, le vote à la présidence de la Mugefci peut aussi constituer un souci majeur pour les autorités.
Mise sous tutelle après plusieurs années de crise et un épisode électoral mouvementé, la Mugefci s’est reprise en 2013 avec l’élection de Mamadou Soro, comme PCA. Avant de connaître une autre division en 2017, lorsque Mesmin Comoé arrive comme PCA.
Les fonctionnaires affirment qu’ils peinent à se soigner. Des prestations censées être prises en charge par l’assurance, ne le sont plus. Avec la généralisation de la Couverture maladie universelle, l’arrimage Mugefci-CMU, ne plaît pas encore à tout le monde.
Une question qui sera au centre de la bataille pour le contrôle de la Mugefci, sous le regard de 200 000 fonctionnaires.
Raphaël Tanoh