Dans cet entretien, Alain Kouakou Prao, psychologue au centre de transit Bloom, évoque les causes qui peuvent pousser au suicide.
Croyez-vous que les cas de suicides relevés en Côte d’Ivoire, dans le mois de janvier, signifient forcément que les Ivoiriens ont une tendance suicidaire ?
Pas nécessairement. C’est difficile d’aller dans ce sens sans mener une véritable étude exhaustive. Ce que nous avons constaté, c’est simplement la hausse des cas pendant une période. Le fait que ces cas soient assez médiatisés peut laisser croire à une amplification du phénomène.
Qu’est-ce qui peut expliquer, d’après vous, autant de cas de suicides ?
Plusieurs facteurs sont à prendre en compte. Mais le plus courant, c’est la dépression. Dans notre travail, nous relevons de nombreux cas de ce genre. Les gens ont beaucoup de problèmes. Il leur faut gérer cette pression. La dépression peu être liée à un problème familial. Malheureusement, il n’y a pas de prise en charge. L’individu se replie sur lui-même. Et ça peut entraîner ce que nous voyons.
Que faut-il faire pour éviter cela ?
C’est l’entourage qui doit faire attention. Il faut observer certains signes chez les personnes qui ont des tendances suicidaires. A partir du moment où l’individu est tout le temps triste, il faut commencer à s’en inquiéter. Il arrive aussi que le sujet soit reclus ou qu’il s’enferme dans un mutisme courant. Par moments, on peut observer chez la personne une perte de l’appétit ou de poids. Il est en général fatigué. Quelquefois, la personne a des idées suicidaires. Il n’a plus goût à la vie. Il arrive même qu’il annonce qu’il va s’ôter la vie.
Les sollicitations vis-à-vis des psychologues pour gérer ce type de cas sont-elles fréquentes ?
Les psychologues sont assez consultés dans ce sens. Mais c’est en général une frange de la population qui a recours à nos services. Les plus aisés, alors que beaucoup de personnes de classe moyenne ont besoin d’être suivies.
Les consultations sont-ils efficaces ?
Le suivi est toujours utile.
Peut-on valablement établir un plan national de lutte contre les suicides ?
Ce que l’Etat peut faire, c’est de sensibiliser. Il faut appeler les gens à s’ouvrir et à voir les spécialistes. La sensibilisation doit également toucher les familles afin qu’elles fassent attention aux signes avant-coureurs.
Une personne qui a déjà essayé de se suicider peut-elle recommencer ?
Après la tentative, le sujet peut toujours récidiver si on ne le prend pas en charge correctement.
Entretien réalisé par Raphaël Tanoh