Pratique de l’excision en Côte d’Ivoire : les imams toujours divisés

par NORDSUD
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Le ministère de la Femme, de la famille et de l’enfant affirme avoir recensé, de 2018 à 2020, 54 cas de mutilations génitales féminines et 10 cas rien que pour le seul mois de janvier 2021.

À la veille de la Journée mondiale de lutte contre les mutilations génitales, le 6 février, la question de l’excision est toujours posée avec autant d’acuité. Si la sensibilisation suit son cours, la division règne encore, notamment au niveau de la communauté musulmane et des guides religieux.

Pilier dans la lutte contre cette pratique, Cissé Djiguiba, président de la Fondation Djigui, a témoigné en 2019 que le fait de prendre position contre les mutilations génitales avait fait de lui une cible pour certains imams. Aujourd’hui, dit-il, si beaucoup ont compris, certains restent encore à sensibiliser.  

Au sein de la communauté, il y a plusieurs positions. D’abord, ceux qui sont catégoriques sur les dangers de la mutilation génitale féminine. C’est notamment le cas de Koné Mory, imam de la mosquée Al-houda Wa Salam d’Adjamé-Payet extension. «Jamais je n’exciserai mes filles. C’est une pratique à laquelle je n’adhère pas. Ce n’est pas parce que la religion l’interdit, mais à cause des conséquences sur la santé», explique-t-il.

Tout comme lui, de nombreux guides religieux ont compris cela, avec surtout les campagnes de sensibilisations menées par la Fondation Djigui au sein de la communauté. «Au sein de la communauté, on commence à réaliser les dangers de l’excision», ajoute l’imam Mory Koné.

Mais il y a les imams qui sont pour. Comme Bacounady Ouattara, l’imam de la mosquée de la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca).

«Je suis pour l’excision. Je ne dirais pas que je suis un expert de la question. Mais l’islam n’interdit pas l’excision. Ceux qui la pratiquent le font pour préserver la chasteté de leurs enfants et éviter qu’elles tombent dans la débauche. Ce sont nos traditions, il ne faut pas l’oublier», explique-t-il.

À l’image de Bacounady Ouattara, de nombreux guides religieux continuent de prôner cela au sein de la communauté musulmane. L’imam Cissé Djiguiba, l’a maintes fois signalé : la sensibilisation doit continuer. Elle ne doit jamais s’arrêter.

Ensuite, il y a les imams qui ne sont ni pour ni contre.

«Il se raconte que le Prophète (SAW) a dit à une femme à Médine qui pratiquait l’excision : ‘‘ne coupe pas tout’’. Il ne l’a pas interdite de pratiquer l’excision, mais il ne l’a pas non plus encouragée à le faire. C’est pour cela que les positions sont aussi partagées en islam», indique Hassan Camara, imam de la Mosquée Médine d’Adjamé. Qui ajoute : «je ne suis pas pour l’excision, car cela nuit aux femmes. Mais je ne condamne pas celui qui la pratique».

Le Coran, reconnaissent les imams, n’aborde pas le sujet. Ce n’est que dans les hadîth que chacun tente de trouver une justification à la pratique ou non de l’excision.  Si l’excision est plus pratiquée au Nord et à l’Ouest, d’après certains imams, il faut relever que ce n’est pas une question de religion.  

Pour Prof. Bakayoko-Ly Ramata, l’Etat va accentuer la sensibilisation et serrer l’étau autour des exciseuses qui continuent de sévir à l’intérieur du pays.

Raphaël Tanoh

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