La récente mission de Sébastien Dano Djédjé auprès de la CEI, au nom de Laurent Gbagbo, relance le débat sur l’éligibilité de l’ancien président en 2025. Si la majorité présidentielle semble divisée sur cette question, le président Alassane Ouattara, bien que favorable à une compétition démocratique, reste prudent face aux risques de tensions postélectorales.
Envoyé par Laurent Gbagbo, Sébastien Dano Djédjé s’est rendu à la Commission Électorale Indépendante (CEI) pour deux objectifs majeurs : demander une prorogation de la révision de la liste électorale et plaider pour la réinscription de Laurent Gbagbo sur cette liste. Dano Djédjé a pointé des « engorgements » administratifs empêchant certains citoyens d’obtenir les pièces nécessaires pour s’enrôler, une situation qu’il juge « incompatible avec des élections apaisées ».Lors de cette rencontre, le président de la CEI, Ibrahime Kuibiert-Coulibaly, s’est montré diplomate, évoquant une discussion qui mêle « droit et humanité ». Il a promis de transmettre ces préoccupations aux autorités compétentes et d’examiner la possibilité de solutions concertées, tout en soulignant que certaines discussions « se feront peut-être à l’abri des regards ».
Les dissensions au sein de la majorité présidentielle
Cette question épineuse divise au sommet de l’État. Selon des sources proches du RHDP, une première tendance, dirigée par Alassane Ouattara, verrait d’un bon œil l’inscription de Laurent Gbagbo sur la liste électorale. « Le président Ouattara est confiant en la force du RHDP et ne craint pas de se mesurer à son rival historique », souligne une source bien introduite. En effet, avec une large victoire lors des élections locales (Ndlr :123 communes et 25 régions remportées), le parti au pouvoir conserve une position dominante dans le paysage politique ivoirien.Cependant, d’autres au sein de la majorité s’inquiètent des conséquences potentielles d’une candidature Gbagbo. Le souvenir des violences postélectorales de 2010, qui avaient plongé la Côte d’Ivoire dans le chaos, reste vivace. Selon les partisans de cette prudence, Gbagbo pourrait une nouvelle fois mobiliser ses partisans en cas de défaite, mettant en péril les acquis de stabilité et de développement du pays.
Une attente stratégique
La réinscription de Laurent Gbagbo sur la liste électorale, si elle se concrétise, pourrait marquer un tournant dans l’histoire politique récente de la Côte d’Ivoire. Elle représenterait une ouverture démocratique, témoignant d’un apaisement progressif des tensions post-crise. « Nous voulons des élections où le vainqueur est félicité par le perdant », a insisté Dano Djédjé, traduisant une volonté de son camp d’éviter toute contestation brutale.Cependant, cette décision comporte des risques. Alassane Ouattara, tout en étant favorable à une compétition électorale équitable, pourrait retarder son annonce jusqu’à mi-2025, évaluant les répercussions sur le climat social et politique. Pour un pays qui aspire à la paix et au développement, un équilibre délicat devra être trouvé entre inclusion démocratique et préservation de la stabilité.La décision finale, attendue dans les mois précédant la présidentielle de 2025, sera scrutée de près, autant pour ses implications politiques que pour ses effets sur la paix sociale. En attendant, le dialogue entre les acteurs politiques et institutionnels reste la clé pour garantir une élection apaisée et crédible.
Armand BLEDOU