Covid-19 : Les failles dans le système de dépistage

par NORDSUD
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Depuis fin décembre, le nombre de cas de Covid-19 repart à la hausse en Côte d’Ivoire. Si le gouvernement ne parle pas encore de deuxième vague, la chaîne d’endiguement du virus présente des failles.  

Selon Mamadou Samba, directeur de la santé, la Côte d’Ivoire teste 3 000 à 4 000 personnes par jour. Ce, grâce aux onze centres de prélèvement dont elle dispose sur l’ensemble du territoire national. Le pays compte environ 146 décès pour plus de 2500 cas actifs.  Loin derrière le Sénégal (410 décès) et le Ghana (335 morts), la situation sanitaire de la Côte d’Ivoire est pourtant passée à l’orange ces derniers jours.  En cause ? Le taux de positivité. Il est passé à 7 %. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’épidémie n’est sous contrôle qu’avec un taux de 5 % de positivité.

Pour éviter la saturation des infrastructures sanitaires, pire cauchemar de tout pays, les autorités s’emploient à garder le virus sous contrôle. Il faut dire que la résurgence du virus en Europe et les nouvelles variantes inquiètent.

Selon plusieurs experts, le séquençage génétique montre que le nouveau variant 501Y.V2 qui circule en Afrique du Sud pourrait être présent dans d’autres pays. Selon l’OMS, ce variant a été trouvé au Botswana, au Ghana, au Kenya, dans la région française de l’Océan indien à Mayotte, en Zambie et dans 24 pays non-africains.

La Côte d’Ivoire n’est pas épargnée.  L’un des nouveaux variants a-t-il été détecté sur le sol ivoirien ? On l’ignore, selon le directeur de la santé. En fait, des tests sont toujours en cours à l’Institut Pasteur.

Autant d’alertes qui pèsent sur le pays. Pour éviter d’être débordé, il faut, certes, sensibiliser, mais également dépister. La capitale économique compte 8 centres de prélèvement. Les centres de Cocody Saint-Jean, Plateau (sorbonne), Marcory (derrière Cap-Sud), Yopougon (stade BAE), CHU de Treichville, Treichville (Bourse du Travail), Port-Bouët, Abobo Sogefiha.

Tests gratuits

Mais, le test étant volontaire, les personnes socialement aisées sont les plus nombreuses à les fréquenter, d’après une source au sein de l’Institut national de l’hygiène publique (Inhp). « Les gens s’imaginent que c’est une maladie de riches. Or, elle touche tout le monde », indique notre informateur, qui incite les Ivoiriens à faire de plus en plus de tests. « Le test est gratuit. Si vous pensez que le virus ne peut pas vous faire de mal, pensez aux autres personnes de votre famille, qui ont peut-être des maladies chroniques », ajoute-t-elle.

Les Ivoiriens boudent-ils les tests ? Pour certains, c’est la capacité de tests qui n’est pas encore énorme. «L’accessibilité pose problème. Le nombre de centres dans tout Abidjan est insuffisant. Il faut souvent se déplacer sur une longue distance pour faire son test, cela décourage les gens. Il faut par exemple initier des tests mobiles dans les quartiers. En plus de cela, faire son test une foi ne suffit pas. Il faut le faire régulièrement. C’est tout cela qui démotive », explique Jean-Luc Assemian, informaticien, qui estime avoir déjà fait son test à Abobo.

Un autre fait évoqué : la mise en quarantaine. « Nous ne disposons pas d’assez d’infrastructures pour mettre en quarantaine chaque personne testée positive », explique notre source à l’Inhp. La solution trouvée est l’auto-confinement. La personne testée positive s’isole chez elle pour éviter les contacts. Mais l’exercice n’est pas très souvent respecté.

« L’Etat ne peut pas mettre des policiers devant la maison de chaque personne. On parle de civisme. Si vous êtes positif au coronavirus et que vous sortez acheter du pain, c’est une preuve d’irresponsabilité, que voulez-vous que l’on fasse ? », regrette Soumahoro Ben N’Faly, président de la Fédération ivoirienne les Consommateurs le Réveil (Ficr).

Guérison

Des attitudes qui grippent la machine de lutte contre le coronavirus et sabotent les efforts des autorités. «Nous avons un taux de guérison assez élevé, c’est ce qui permet jusqu’ici d’éviter une catastrophe sanitaire », indique notre informateur à l’Inhp.

Vu de l’extérieur, le tableau parait moins effrayant. Mais, en interne, des malades, hommes, femmes et enfants jouent leur vie tous les jours. Selon le directeur général de la santé, la semaine dernière, ce sont 37 personnes qui ont été prises en charge dans le secteur public. Une dizaine ont été placées en réanimation.

Mamadou Samba rassure sur la capacité des structures de prise en charge. Ce sont, 619 lits dont 70 de réanimation, à Abidjan et 406 lits avec 100 lits de réanimation à l’intérieur du pays.  Mais tout cela ne tient qu’à un fil. Avec les nouvelles variantes de coronavirus, il suffit que le nombre de personnes en réanimation grimpe et ce sera bonjour l’hécatombe.

L’autre aspect à verrouiller dans le système sanitaire, c’est l’aéroport. À défaut d’interdire les vols, il faut un système de filtrage infaillible. Et l’un des éléments qui saute aux yeux à ce sujet, c’est cet épisode des voyageurs ivoiriens qui, après avoir passé le test en Côte d’Ivoire, ont été obligés de passer un autre test anti-covid avant d’être acceptés sur le sol français.

Gestion

La qualité des tests ivoiriens poserait-elle problème ?  Mamadou Samba explique qu’il s’agit d’une simple erreur technique qui a été réglée depuis. Mais c’est la fiabilité des tests qui est mise en cause ici. Si ces types d’erreurs peuvent survenir pour des personnes qui sortent du pays, elles peuvent aussi exister pour les personnes qui entrent sur le territoire Ivoirien. L’épisode des faux certificats de négativité délivrés par certains individus, révélé récemment par le ministère de la Santé et de l’hygiène, a montré qu’il faut se méfier.

Tous ces éléments réunis entravent la chaîne de dépistage et rendent la gestion de la Covid-19 un peu plus compliquée. Mais Mamadou Samba met en garde. La première barrière contre la Covid-19, c’est le respect des mesures barrières. L’état d’urgence sanitaire décrété la semaine dernière n’est qu’une mesure préventive. Un premier pas du gouvernement pour prendre de nouvelles mesures restrictives si l’épidémie n’est pas contenue.

Raphaël Tanoh

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