L’affaire Yves de M’Bella fait couler et continuera certainement de faire couler beaucoup d’encre et de salive durant les prochains jours. Mais la condamnation de l’animateur à 12 mois de prison avec sursis pour apologie du viol n’aura été qu’anecdotique, en fin de compte, devant le problème de société que cette affaire soulève. Pour commencer, pourquoi cela n’a-t-il pas paru insensé à ce quinquagénaire ‘‘chevronné’’ de la télé qu’inviter un présumé violeur sur les antennes de la chaîne pour que ce dernier puisse se vanter en direct de ses actes, était simplement mal ? Simple question de bon sens. Pourquoi, de la préparation de cette étrange émission, ‘’la Télé d’Ici Vacances’’, à sa diffusion le 30 août dernier, il n’y a eu personne pour dire à De M’Bella que son émission allait choquer le monde entier ?
L’explication la plus tentante, c’est que nous en sommes venus à nous complaire dans l’opprobre. Un homme est accusé de vol sur les réseaux sociaux, quelques instants plus tard, elle devient une star nationale à qui des personnalités veulent associer leur image. Une personne publique est mourante sur son lit d’hôpital, on a aucun scrupule à poster son image sur le Web pour en rire, s’en amuser ou satisfaire un voyeurisme morbide.
Vivre dans une société ou des faits intolérables sont tolérés peut amener à un moment donné les gens à en faire l’apologie. L’affaire Yves de M’Bella n’est en réalité que l’arbre qui cache la forêt. Il ne s’agit pas d’une simple faute professionnelle. Mais du reflet d’une société qui a besoin de s’arrêter un moment pour se regarder dans la glace. Clips abjects, émissions obscènes, dépravations des mœurs…Y a-t-il aujourd’hui une différence fondamentale entre ce que nous laissons passer à la télé et ce qui est à condamner ?
M’Bella payera probablement pour sa faute. Mais s’arrêter là et passer à autre chose serait une erreur. Cette levée de boucliers contre l’‘‘immoral’’ que les Ivoiriens ont observé doit rester inébranlable, à jamais.
Raphaël Tanoh