Les mots qui tuent

par NORDSUD
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Alassane Ouattara. «Les hommes construisent trop de murs et pas assez de ponts». Cette boutade célèbre du philosophe et mathématicien Isaac Newton, le Président ivoirien l’affectionne particulièrement. Lui, féru bâtisseur, qui a jeté toute son énergie au sortir de la crise de 2010 dans la construction de chantiers d’infrastructures tous azimuts : Écoles, hôpitaux, électricité, eau potable mais surtout échangeurs, ponts et routes pour faciliter les échanges entre les hommes et les biens pour un meilleur partage des acquis de la croissance.

Pour le chef de l’Etat ivoirien, plus que des mots, des états généraux de la République, des dialogues politiques interminables, ce sont ces actes là qui consacrent durablement la réconciliation nationale et la paix durable dans son pays.  

La paix durable et définitive. Alassane Ouattara en a fait un credo. Il est obsédé par l’histoire tumultueuse de notre pays, depuis la disparition du président Houphouët-Boigny jusqu’à la grave crise postélectorale de 2010.

Une histoire dont il a été un des acteurs majeurs. Mais surtout la principale victime.

Pour cette raison principalement, il veut laisser, transmettre aux générations qui viennent, un pays pacifié, pacifique et durablement stable.

Une Côte d’Ivoire en paix durablement et définitivement, cela reste le défi. Quand on sait d’où nous venons. Mais aussi, au regard des discours et des acteurs en présence, ce qui nous attend dans un futur proche.

Retour vers le passé. À cet égard, Laurent Gbagbo, fidèle à lui-même, donne une idée, dans un discours tenu à Mama devant les instances de son parti, du climat politique qu’il souhaite instaurer d’ici 2025.  

Cette sortie de Gbagbo est un archétype du genre. Son modèle-type. Ce n’est pas le premier et ce ne sera pas le dernier discours confligène.

«Voilà chers amis, des idées que je jette ici et là.. » dit-il. Autant de bouts de haine, de braises incandescentes «jetés ici et là» à côté du baril de poudres des plaies encore béantes de nos déchirements passés. Avec le dessein que l’incendie reparte.

Personne dans ce pays n’oublie que ce sont des mots, rien que des mots qui ont mis le pays à feu et à sang. Des mots dont un bon flot est venu de la bouche de Laurent Gbagbo.

Son plan est simple.

D’abord, il galvanise ses troupes. Qu’il chauffe régulièrement à blanc. En rappelant les épreuves – les emprisonnements, l’exil – vécues pendant la crise postélectorale de 2010. Il joue la victimisation à outrance pour préparer les esprits à la revanche. À coup d’amnésie et de révisionnisme, Gbagbo et ses partisans se sont absous de tout. Ils ne sont responsables de rien. Ils sont même des victimes expiatoires en droit de demander réparation.  

Ensuite, le choix des thèmes. Laurent Gbagbo en a choisi quelques-uns. Qu’il trouve mobilisateurs : L’élection de Ouattara en 2020 serait «un coup d’état civil», les détresses subies par l’ouest ivoirien assimilées à un «génocide». Ou encore ses critiques du bilan de Ouattara. Sur ce point, Gbagbo est moins heureux : Tous les observateurs, les Gbagbo Ou Rien y compris, font le constat que le pays est en pleine transformation sous le magistère d’Alassane Ouattara.

Que cherche donc Laurent Gbagbo ? Que veut-il ? Où est donc la réconciliation que son camp nous avait promise pour annoncer son retour ?

Ses militants le disent : Gbagbo prépare patiemment «le match retour» en 2025. Il reste fidèle à sa conception du débat public. La politique pour lui est un champ de confrontations violentes. Ce sera toujours la domination, la suprématie d’un camp sur l’autre. Pas de place pour une coexistence pacifique, un débat d’idées porteuses de progrès.

L’horizon vers la paix durable et définitive recèle des obstacles certains. Laurent Gbagbo est un de ces obstacles.

En tout état de cause, la pacification définitive du pays, c’est l’autre rive, sorte de terre promise vers laquelle Ouattara veut mener son pays.

Cela reste le défi le plus grand de sa gouvernance.

Méité Sindou

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