Présidentielle du 25 octobre : le baroud d’honneur de Gbagbo et Thiam

par nordsud.info
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Exclus de la présidentielle du 25 octobre, Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam jouent leur dernière carte en projetant une série de manifestations publiques dont l’objectif inavoué, serait d’empêcher la tenue du scrutin.

A l’offensive

C’est, pour eux, un baroud d’honneur. Convaincus qu’ils pouvaient battre Alassane Ouattara à la présidentielle de 2025, l’ancien chef de l’État Laurent Gbagbo et l’ex-ministre Tidjane Thiam avaient chacun élaboré une stratégie censée être imparable. Leurs partisans, mobilisés derrière eux, y croyaient fermement.

Mais le président du Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPACI) et son nouvel allié du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) ont, selon certains de leurs proches, manqué de clarté avec leurs militants, leur présentant un projet de conquête du pouvoir jugé fragile et irréaliste.

Gbagbo, le retour d’un éternel combattant

Radié de la liste électorale depuis 2020 à la suite d’une condamnation à vingt ans de prison pour le « casse de la BCEAO » commis lors de la crise postélectorale de 2011, Laurent Gbagbo avait déjà vu sa candidature rejetée lors de la précédente présidentielle. En novembre 2022, sa demande de réinscription sur la liste électorale, introduite à la faveur de la révision annuelle, n’avait pas abouti.

« On n’a pas mis mon nom sur la liste électorale, prétextant que j’ai été condamné pour avoir braqué la BCEAO. Je réfute avec vigueur une telle accusation. Non, non et non, je ne laisserai pas mon nom sali sans me battre. Je suis encore debout ! », s’était insurgé l’ancien président. Mais sa colère n’a rien changé à la perte de ses droits civiques et politiques.

C’est donc un homme que ses partisans jugent toujours combatif qui s’est lancé dans la bataille politique en vue de la présidentielle de 2025. Très offensif lors de ses meetings organisés dans le district d’Abidjan, l’ancien pensionnaire de la prison de Scheveningen (La Haye, Pays-Bas) n’a jamais laissé paraître le moindre doute sur le rejet de sa candidature. Bien au contraire, il a multiplié les attaques contre la candidature de son rival historique, Alassane Ouattara. Pour lui, cette élection représente la dernière chance de laver l’affront de sa chute de 2011.

L’espoir entretenu

Malgré l’invalidation de sa candidature — prévisible pour nombre d’observateurs —, Laurent Gbagbo continue d’entretenir l’espoir d’un revirement, misant sur une saisine de l’ONU et sur des manifestations populaires pour peser sur le processus électoral.

Thiam, entre ambitions internationales et désillusion nationale

Dans cette logique, il a fini par se rapprocher de Tidjane Thiam, désormais son allié. Pourtant, au cours de l’année 2024, les relations entre les deux hommes avaient été tendues. À cette époque, le nouvel homme fort du PDCI, successeur d’Henri Konan Bédié, se montrait peu enclin à coopérer avec certains leaders politique. Fort de son expérience internationale, l’ancien patron du Crédit Suisse se plaisait à souligner son réseau et ses compétences comme des atouts pour conquérir le pouvoir.

« Il faut que nous continuions à nous mobiliser. Nous avons la meilleure équipe de Côte d’Ivoire et cette équipe va gagner », déclarait-il en septembre 2024, au siège de son parti. Et d’ajouter : « je refuse de pactiser avec ceux qui ont recours à la violence. La fin ne justifie pas les moyens. C’est la théorie du serpent dans le pantalon : une fois qu’on l’a mis, il n’est pas facile de s’en débarrasser ».

Des propos perçus, dans l’entourage de Laurent Gbagbo, comme une pique directe à son encontre, ce qui avait alors refroidi leurs relations. Mais la donne a changé le 22 avril 2025, lorsque Tidjane Thiam est radié de la liste électorale définitive et prend le chemin de l’exil volontaire.

Une radiation qui change la donne

Avant cette date, le petit-fils de Félix Houphouët-Boigny avait pourtant assuré de son éligibilité et proclamé sa confiance dans la légalité de sa candidature. Le 7 février 2025, il surprend en annonçant avoir entamé une procédure de renonciation à la nationalité française. À partir de là, son projet politique s’est effondré, l’invalidation de sa candidature scelle l’échec de son ambition, même s’il continue d’espérer un improbable repêchage.

« Nous n’abandonnerons jamais cette lutte jusqu’à obtenir justice », déclarait-il le 8 septembre 2025, après la publication de la liste des candidats retenus par le Conseil constitutionnel. Au terme d’un mission à Abidjan de l’ONG américaine International Republican Institute (IRI), 21 au 26 septembre 2025 et qui pointe dans son rapport sur son observation préélectorale quelques failles dans le système électoral ivoirien, l’ancien ministre du Plan et du développement, se prend à rêver.

« Le peuple ivoirien, uni et déterminé, ne saurait tolérer un nouveau verdict imposé d’avance. J’en appelle à la Maison Blanche, à l’Union européenne, aux Nations unies, à l’Union africaine et à la CEDEAO pour qu’ils exercent une pression sur le régime Ouattara, afin de garantir une élection réellement démocratique et inclusive », déclare-t-il.

Recours à l’ONU : le dernier espoir

C’est dans ce climat tendu que l’ONU a répondu, le 7 octobre, au recours introduit conjointement par les deux leaders. Le Conseil des droits de l’homme a indiqué qu’il ne se prononcerait sur le fond qu’en février 2026, soit trois mois après la présidentielle.

Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam, désormais unis dans l’adversité, misent donc sur la paralysie du pays ou le boycott du scrutin. Mais cette stratégie est loin de faire l’unanimité, d’autant que les deux hommes avaient eux-mêmes désavoué la création, en 2020, du Conseil national de transition mis en place par l’opposition après son échec à empêcher la réélection d’Alassane Ouattara.

Un projet de marche et mille questions

Qu’à cela ne tienne, le projet de marche du 11 octobre, censé marquer le début de leur mobilisation, n’a toujours pas reçu l’autorisation des autorités. Le Conseil national de sécurité, réuni le 2 octobre dernier, a en effet décidé d’interdire toutes les manifestations publiques visant à contester les décisions du Conseil constitutionnel du 8 septembre 2025.

Marc Dossa

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