Abobo, Koumassi et Adjamé: Déguerpir pour reconstruire

par NORDSUD
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Depuis son élection à la mairie d’Abobo, le ministère d’Etat, ministre des Affaires étrangères, veut remodeler sa commune à son image. Mieux, Kandia Camara a l’intention de s’approprier le prix de la commune la plus propre. Mais la tâche s’annonce ardue. Car, d’autres communes sont en lice.  

Casse d’Abobo, ce lundi 24 janvier. Plusieurs agents municipaux, soutenus par une poignée de policiers, montent la garde aux abords de la voie express. Autrefois fourmillant de box de pièces détachées et dénaturée par les carcasses de véhicules, cette ferraille a été déguerpie depuis le 4 janvier. Pas question pour la maire d’Abobo, Kandia Camara, que le site soit recolonisé. Selon les services de la mairie, 300 jeunes ont été recrutés récemment à la police municipale pour, entre autres, surveiller tous les lieux déguerpis. Beaucoup ont été affectés sur le site de la ferraille. Ils le gardent comme du lait sur le feu.  Pour éviter les déboires du déguerpissement de 2012, Kandia Camara a mis en place un comité de 32 membres, avec en son sein toutes les associations: commerçants, garagistes, menuisiers, artisans, ferrailleurs et même les religieux. Objectif, sensibiliser leurs différents membres.

Parmi ces hommes de terrain, celui qui avait la tâche la plus ardue, c’est Hamed Traoré, le président de la chambre des métiers d’Abobo. «En plus de la mairie, nous avons reçu un courrier du ministère de la Promotion des PME, de l’artisanat et de la transformation pour que les ferrailleurs quittent le site. Au sein du comité de 32 membres qui a été mis en place, il en avait 15 qui appartenaient aux ferrailleurs. Malgré cela, ça n’a pas été facile, parce que les gens ne voulaient pas aller à N’Dotré. Mais, aujourd’hui, sur les 200 magasins ouverts là-bas, déjà 100 sont occupés par les ferrailleurs. La maire d’Abobo, Kandia Camara, a promis de les accompagner avec 10 millions de FCFA afin qu’ils s’installent», indique Hamed Traoré.

C’est donc terminé pour cette ferraille. «L’endroit est considéré comme la vitrine d’Abobo. La maire prévoit une piscine olympique, un institut islamique, un lycée d’excellence Alassane Ouattara», ajoute le président de la chambre des métiers d’Abobo.  

Tout comme la casse, les alentours de la mairie d’Abobo sont dorenavant clairsemés. Le faible attroupement qu’on n’y voit ce lundi, est dû aux personnes venues se faire vacciner contre la Covid-19, grâce aux camions de vaccination du ministère de la Santé, de l’hygiène publique et de la Couverture maladie universelle, postés là. Depuis le rond-point Samaké, jusqu’au rond-point de la mairie, les voies ont été dégagées des box de commerces illégaux ainsi que des vendeurs ambulants. Le petit marché qui ceinturait le bâtiment de la mairie n’est plus qu’un vieux souvenir. Les gbakas et wôrô-wôrô (véhicules de transport en commun), qui avaient fait du rond-point de la mairie leur lieu de prédilection ont été chassés. La voie express menant à Abobo-Banco a également été assainie. PK 18, N’Dotrée, voie mairie-Biabou, etc.,   les routes et les ruelles d’Abobo respirent. Et ce, depuis novembre 2021. Grâce à une sensibilisation massive et à l’implication des leaders d’associations, la population adhère à cette opération. «Nous avons compris que c’est important pour la commune. Ce que nous demandons, c’est que la mairie trouve des endroits où nous pouvons vendre», note Moussa Diakité, vendeur d’articles divers vers le rond-point de la mairie, qui a été déguerpi.  

Le défi pour Abobo sera d’éviter la réoccupation des sites. Un casse-tête pour toutes les mairies. Celui qui l’a jusque-là réussi, c’est bien Ibrahim Cissé Bacongo, maire de Koumassi, qui détient le prix d’excellence de la commune la plus propre. Avec 174 milliards FCFA dégagés par l’Etat dans le cadre du plan d’urgence pour Abobo, Kandia Camara veut s’emparer de ce trophée. C’est pour cela que l’ «opération ville propre» qu’elle a entamée est accompagnée de plusieurs projets routiers. Près de 15 km de voies de déviation ont déjà été réhabilitées ou construites. Un nouveau marché est prévu. Ce sera le plus grand d’Afrique de l’Ouest, selon la mairie. Il permettra de dégager l’actuel marché embourbé dans l’insalubrité.

Pour autant, ce ne sera pas de la sinécure. Parce qu’une telle opération implique de prendre en compte certains aspects qui sont souvent occultés dans les budgets.

Koumassi : Les ‘‘nouveaux projets’’ de Cissé Bacongo

À Koumassi, le maire Cissé Bacongo a commencé par lutter contre le désordre. «C’est la première étape pour aller vers la propreté. C’est après avoir vu cela que le ministère de la Ville a institué un prix d’excellence contre le désordre», explique un proche collaborateur du maire. Ensuite, dit-il, il a fallu réinsérer certaines personnes touchées par le déguerpissement, afin d’éviter des foyers de tensions. «Les Gnambôrô (chargeurs dans les gares), par exemple, ont été reconvertis notamment en commerçants, en pompiers civils», explique notre interlocuteur. Ce n’est pas tout. «Après le déguerpissement, il faut décourager toute forme de recolonisation en procédant à l’embellissement des sites. C’est ce que nous avons fait», poursuit-il. Dernière étape : ouvrir l’śil. Quasiment tous les jours, le maire Cissé Bacongo sillonne les sites déguerpis. À la moindre anomalie, il descend de sa voiture pour interpeller en personne les mis en cause. Cissé Bacongo n’a pas l’intention de laisser échapper son prix d’excellence. Il veut refaire la piscine et le parc de Koumassi. Dans quelques jours, il va même inaugurer tout un quartier en pavé, à ‘‘Koumassi trois ampoule’’. Les concurrents sont prévenus.

Déguerpissement : Quel visage pour Adjamé ?

La barre est placée haut. Et tous les regards sont dorénavant tournés vers Adjamé, avec comme principaux défis, d’abord, la réorganisation des gares anarchiques. «Des réunions successives ont lieu avec le maire, Soumahoro Farikou. D’ici le 15 février, les gares anarchiques vont disparaître. Nous sommes en train de réfléchir à deux endroits à la rentrée d’Adjamé où toutes les gares seront regroupées.  Il n’y aura que le taxis-compteurs qui arriveront à Mirador et à Liberté», indique Adama Touré, président de la Coordination nationale des gares routières de Côte d’Ivoire (Cngrci). Ensuite, il faut assainir l’emblématique Boulevard Nangui Abrogoua. Les opérations tentées dans ce sens ont jusque-là échoué. Mais, la chance pour la maire, ce sont les travaux du 4ème pont. Ce projet prend en compte la réhabilitation du boulevard et des voies annexes. Déjà, les box de commerce sur les sites sont en train d’être démolis. Encore loin dans la course pour la commune la plus propre, Soumahoro Farikou aura pour challenge de trouver des sites de recasement pour les commerçants de sa commune. Une prouesse qu’il devra réussir. Parce qu’il est lui-même le président de la Fédération nationale des commerçants de Côte d’Ivoire (Fenacci).

Raphaël Tanoh

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